Credit Andrew Callabero/Reynolds/AFP/Getty |
Des tipis dressés non loin de la Maison Blanche, autour
du Washington Monument, c’est l’image pleine de symboles que les promeneurs
pouvaient observer il y a quelques jours à Washington DC. Des milliers de
Natifs américains ont convergé sur la capitale pour quatre jours de célébrations
et une manifestation le 10 mars.
Un pipeline sous le Missouri
A l’origine de cette manifestation, un pipeline dont la construction était en cours l’an dernier dans le Dakota du Nord. A l’origine, le tracé du pipeline devait passer au nord de la ville de Bismark, mais les habitants ont demandé et obtenu son détour. Il fut convenu que le tracé passerait plus au nord, à la lisière de la réserve de Standing Rock (une des tribus Sioux), et sous le fleuve Missouri.Map by Carl Sack |
« Si vous connaissez l’histoire des Nations Sioux,
vous savez que le développement du fleuve Missouri au 20eme siècle a toujours,
toujours, signifié la prise de terre Indienne. Des barrages en amont et en aval
du Missouri ont été construits et chaque réserve Indienne aux alentours a été inondée.
Les meilleures terres furent inondées. Une aggravation de la pauvreté des
Natifs en a résulté. Nous devons avoir conscience de cette histoire. Nous
devons le savoir pour comprendre les évènements contemporains. »
Les protestataires de Standing Rock craignaient que les
fuites possibles du pipeline ne polluent l’eau du Missouri, leur unique source
d’eau potable. Ils voulaient aussi protéger certains lieux qui ont grande
valeur à leurs yeux.
Des cimetières symboliques
Les tribunaux ont été saisis, les membres de la tribu expliquant
que les terres qui allaient être utilisées pour le passage du pipeline avaient une
« signification culturelle profonde » justifiant un nouveau détour du
pipeline.
Mais qu’il est difficile de définir la signification
culturelle d’un lieu quand on appartient à une autre culture….
Au cours des siècles, les Dakotas (Sioux) n’enterraient pas leurs morts. Ils
les disposaient sur des plateformes de fortune, avec leurs possessions et leurs
armes à leurs cotés. Les corps, après décomposition, finissaient par
disparaitre. L’échafaudage était alors déconstruit et un monticule de pierres
était assemblé à son emplacement. Ce monticule était l’equivalent d’une pierre
tombale. Ces rochers étaient des repères
marquant la mémoire de ces ancêtres.
D’autres rassemblement de pierres de tailles variables,
certains colorées, avait aussi une grande valeur symbolique et historique. Ils
etaient appelés « Teaching stones » et leur fonction était de
rappeler certaines leçons du savoir ancien.
Comment convaincre un juge quand votre culture n’est pas basée
sur des documents écrits, et qu’il n’y a pas de corps pour démontrer que
l’endroit est l’équivalent d’un cimetière ? Les juges ont écrit dans leurs décisions que
la preuve du « caractère sacré » des lieux n’était pas rapportée. Ces pierres anciennes, qui n’avaient pas été bougées
depuis des siècles, si pleines de sens, ont disparu sous les coups des bulldozers.
Résistance Spirituelle
En avril 2016, un camp de résistance spirituelle et de
préservation culturelle fut créé a proximité du chantier du pipeline, « Sacred
Stone Camp ».
Petit à petit, des Natifs de toutes régions sont venus
les rejoindre dans les terres froides du Dakota du Nord, suivis d’écologistes.
Des acteurs connus (Mark Ruffalo, Patricia Arquette, Sheilane Woodley…) les ont
soutenus, ont attiré la presse tandis que les diverses églises nationales
prenaient position pour les soutenir. Des confrontations avec les forces de
l’ordre ont eu lieu.
Irvin et plusieurs Presbytériens ont visité le camp de
Standing Rock en novembre, apportant le drapeau de la dénomination, qui a
rejoint les nombreux étendards des visiteurs de tous les pays.
En décembre, le président Obama a finalement fait arrêter les travaux et a chargé le corps des ingénieurs de l’armée de trouver un nouveau tracé pour le pipeline, après une étude de terrain approfondie. Un moment d’optimisme, tempéré par la victoire électorale de Donald Trump. Quand celui-ci a pris le pouvoir en janvier, une de ses premières décisions fut d’ordonner la reprise des travaux a Standing Rock.
Une prise de conscience qui se poursuit
En dépit de cette
issue décevante, ce combat a permis la prise de conscience des Natifs de toutes
tribus et de tous les américains, chrétiens ou non, des risques que ce type
d’ouvrage font courir a l’environnement. Ainsi le fait que les nombreux dégâts occasionnés par des
pipelines de ce genre au fil des ans sont nombreux et inquiétants - une fuite
par mois ces 15 dernières années ! Ils ont toujours été minimisés et le
plus souvent même pas mentionnés par les medias.
En se retrouvant à Washington DC au début du mois de
mars, les Natifs et leurs alliés ont montré leur détermination à protéger les
ressources naturelles de la planète ainsi que leur culture et tradition.
Picture by Marlene Helgemo |
Un service luthérien a eu lieu à la cathédrale nationale
la veille de la manifestation.
Rev. Marlene Helgemo, pasteur de All Nations Indian Church dans le Minnosta, delivre un sermon |
Celle-ci a commencé sous la pluie devant les
bureaux du service des ingénieurs de l’armée, puis a fait une étape devant l’hôtel
Trump – un tipi a été construit devant son entrée – avant de se terminer à la
Maison Blanche. Les procédures
judiciaires ne sont pas terminées, même si la construction du pipeline est sur le point d’etre
achevée.
« Je veux que les gens aient le sentiment que nous n’avons
pas perdu. J’ai le cœur brisé mais je suis profondément émue par tout ce que
nous avons accompli, expliqueEryn Wise,
une jeune femme issue des tribus Apache et Pueblo qui a passé 4 mois au camp de
Standing Rock l’an dernier, devenant une des leaders du mouvement International
Indigenous Youth Council[1]. La
menace contre les droits indigènes est constante. Mais avant Standing Rock,
personne n’en parlait. »
[1] ://www.washingtonpost.com/local/american-indians-to-march-on-white-house-in-rally-for-rights/2017/03/10/8b327e84-04e3-11e7-ad5b-d22680e18d10_story.html?utm_term=.c966cb905439
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