Saturday, March 23, 2013

Le chemin des aumôniers


A l’issue du premier “round” de chimio, j’attendais le verdict : et il fut bon. Mes globules blancs n’avaient pas été décimés. La cancérologue m’a fait promettre prudence, précautions et lavages de mains fréquents. Mais elle m’a donné le feu vert. 
J’ai pu emprunter le chemin des écoliers – ou des aumôniers en l’occurrence. Autrement dit : à nouveau visiter les patients de l’Hospice house. J’étais soulagée – et «appréhensive» comme on dit ici. J’avais passé un peu plus de trois semaines en congés forcés. Avec la chimio, mes perceptions corporelles les plus basiques n’etaient plus tout à fait les mêmes. Je me demandais si mon mental serait lui aussi altéré.

Quand je suis arrivée le premier soir – en ce mois de mars, je travaille de 18h à 22h – je me sentais aussi vulnérable et démunie que lors de mon premier jour en septembre. J’ai pensé au verset de la Bible, tiré du livre de l’Exode (33 :14) où le Seigneur promet à Moise «Je marcherai à tes cotés et je te donnerai du repos». 

Ce premier soir, tandis que je parlais à Felicia*, au chevet de sa mère qui allait s’éteindre la nuit suivante, et qu’elle me racontait leur vie, je songeais que sans le savoir elle m’offrait non seulement sa confiance mais aussi l’opportunité de me sentir à nouveau aumônier. Elle me permettait de traverser avec elle ces moments essentiels et douloureux, plein de souvenirs joyeux et de tristesse.  

Ses fils sont allés chercher des pizzas que nous avons mangées tous ensemble. Nous avons parlé de France et d’Allemagne où la famille avait vécu quelques années, de la maladie grave qui avait failli emporter Felicia l’an dernier, et du cancer du sein qui avait eu raison de sa tante ; j’ai mentionné ma chimio, Felicia me posant alors mille questions précises qu’elle n’avait peut-être jamais ose demandées à l’époque à sa parente. 

Lorsque nous nous sommes séparées avec une  «hug» (étreinte à l’américaine) Felicia m’a regardée avec chaleur et compassion. Je n’étais plus seulement l’aumônier de l’hospice house à ses yeux, mais une sœur qui naviguait tout comme elle au milieu des tempêtes.

*pas son vrai nom

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