Saturday, January 21, 2017

Inauguration Désolation


Eh oui, hier vendredi 20 janvier, Trump a été tout inauguré.

J’ai regardé une partie des événements à la TV, et ce n’était pas aussi pénible que je le craignais. La nouvelle First Lady est belle, d’une élégance parfaite, évidemment. Toutes les femmes ont conscience de ressembler à des pots à tabac à ses cotés.


Chaque fois que Trump prend la parole, lors de l’inauguration puis le soir lors des bals, il répète « Je suis le plus fort, j’ai gagné, venez m’adorer ! » Ce n’est pas ce qu’il dit, bien sur. Mais c’est ce que j’entends derrière ses phrases.

Lorsque j’ai voté, en Octobre dernier, ma première fois en Amérique, je n’imaginais pas une seconde que le scrutin délivrerait ce résultat. Pas une seconde. Le bon sens, confirmé par les sondages, le disait bien : Hillary Clinton allait l’emporter.

J’ai rempli, chez moi, le bulletin, qui me demandait mon choix non seulement pour le Président, mais aussi pour le gouverneur de notre Etat de Washington, les représentants au parlement de notre état, dont le parlement est situé à Olympia, une heure au sud de chez nous, les représentants nationaux à Washington DC, et toutes sortes d’offices dans notre Comté. Et je l’ai mis à la poste, comme la plupart des électeurs d’ici le font.

Le soir des élections, les prédictions sont devenues de plus en plus catastrophiques. « Election Night », sur l’écran de la TV, devenait « Election Nightmare » dans mon esprit. Ce n’est pas tant le fait que « ma » candidate ait perdu. L’élection d’un Trump me fait peur. Manque d’expérience, narcissisme, susceptibilité… un cocktail qui fait craindre le pire. 

Pourtant, plusieurs mois auparavant, Jimmy Carter avait dit qu’il le préférait à certains autres colistiers Républicains.  Certains d’entre eux sont très rigides dans leur extrémisme, a-t-il dit en substance. Au moins, Trump est un opportuniste, un pragmatique qui peut changer d’avis. 

Irvin voyageait cette semaine là, et comme son retour avait lieu samedi, j’ai prêché dimanche à sa place. La Church of the Indian Fellowship est une petite congrégation, mais les opinions sont partagées en politique. Ce qui n’est pas une mauvaise chose ! Etre continuellement avec des gens de notre avis nous pousse à devenir extrême dans nos vues. Progressivement, il nous parait impensable que quiconque pense différemment de nous[1]

Et c’est ce que j’ai dit en conclusion de mon sermon : Jésus nous dit d’aimer nos ennemis. Ayons au moins le courage d’écouter nos adversaires en politique, écouter vraiment, sans chercher à avoir le dernier mot. Nous votons dans un certain sens, nous avons des raisons pour cela. Ne nous diabolisons pas les uns les autres.

Apres le culte, une des Elders m’a approchée. Elle m’a dit qu’elle avait sérieusement considéré voter pour Trump – ce qui m’a beaucoup surpris car je la savais Démocrate. « Il faut que les choses changent à Washington DC,  m’a-t-elle expliqué. Mais finalement, je ne l’ai pas fait. En tant que chrétienne, je ne pouvais pas voter pour un homme tel que lui. »

Un autre Elder me dit un peu plus tard « j’ai hésité entre les deux, je ne savais pas trop… Ce qui m’a décidé, c’est que Trump a dit qu’il ne s’excusait jamais. Je me suis dit, pour la diplomatie, ça ne pourra pas aller. Parfois, pour le bien du pays, il faut s’excuser, même si on n’en a pas envie. »  

Trump est en place, et je ne peux même pas espérer qu’un « impeachment » ou, qui sait, un accident de santé, fasse disparaitre le Président le plus âgé à avoir jamais prêté serment – il a 6 mois de plus que Ronald Reagan lors de son entrée en fonction. S’il cessait d’être Président, son Vice-président Mike Pence le remplacerait, conformément a la Constitution. Et il figure dans le club des « rigides dans leur extrémisme ».

Les manifestations des centaines de milliers de femmes dans tout le pays aujourd’hui me donnent pourtant de l’espoir et montrent au monde ce qu’il y a de mieux aux USA : le courage, la créativité et la résolution de ne pas s’en laisser conter.
  





[1] C’est ce que confirme le sociologue Bill Bilshop dans son livre “the Big Sort: Why the Clustering of Like-Minded America is Tearing Us Apart », http://www.thebigsort.com/home.php

Photo de Washington March par Amanda Voisard, Washington Post 

Sunday, January 15, 2017

Une prière pour leaders

Cette prière, écrite par John O’Donohue, a été lue par Elizabeth pour conclure notre retraite commune. 
J’aime ces mots inhabituels qui sont valides pour toutes situations où nous sommes en situation d’autorité, mais aussi simplement en communauté avec d’autres et nous-mêmes. 

Traduire une poésie est un défi intéressant et je me suis permis une certaine audace. John O’Donohue le dit lui-même, la créativité est un trésor qui nous permet de voir au-delà du champ de vision ordinaire. 


Puissiez vous avoir la grace et la sagesse d’agir avec douceur
apprenant à distinguer ce qui est personnel de ce qui ne l’est pas

Puissiez-vous accueillir les critiques avec hospitalité
Puissiez-vous ne jamais vous placer au centre des événements.

Puissent vos actions être motivées, non par arrogance, mais par le gout se servir
Puissiez-vous travailler sur vous-même, construisant et affinant votre esprit,
Puissent ceux qui travaillent pour vous savoir que vous les voyez et les respectez.

Puissiez-vous cultiver l’art d’etre pleinement présent dans chacune de vos rencontres
Quand quelqu’un échoue ou vous déçoit, que votre bienveillance leur ouvre un chemin vers le renouvellement et l’amélioration.

Puissiez-vous chérir les dons de l’esprit par vos lectures et votre créativité
Pour continuer à servir la frontière              
Où le neuf tire son enrichissement de l’ancien sans jamais succomber au pouvoir de l’habitude.

Puissiez-vous connaitre la sagesse de l’écoute approfondie, les paroles intègres qui guérissent,
L’encouragement d’un regard de soutien, la bienséance de la dignité maintenue
Le contours lumineux de la question lugubre.

Puissiez-vous avoir un esprit qui aime les frontières
Vous permettant d’évoquer les champs éclatants au delà du pouvoir de l'œil 

Puissiez-vous avoir des amis fidèles pour vous renvoyer les images que vous avez ratées

Puisse être leader représenter une aventure authentique qui vous fasse grandir
Amen ! 

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May you have the grace and wisdom to act kindly,
learning to distinguish between what is personal and what is not.
May you be hospitable to criticism.
May you never put yourself at the centre of things.
May you act not from arrogance but out of service.
May you work on yourself, building up and refining the ways of your mind.
May those who work for you know you see and respect them.
May you learn to cultivate the art of presence in order to engage with those who meet you.
When someone fails or disappoints you, may the graciousness with which you engage
be their stairway to renewal and refinement.
May you treasure the gifts of the mind through reading and creative thinking
so that you continue as a servant of the frontier
where the new will draw its enrichment from the old, and you never become functionary.
May you know the wisdom of deep listening, the healing of wholesome words,
the encouragement of the appreciative gaze, the decorum of held dignity,
the springtime edge of the bleak question.
May you have a mind that loves frontiers
so that you can evoke the bright fields that lie beyond the view of the regular eye.
May you have good friends to mirror your blind spots.
May leadership be for you a true adventure of growth.
Amen!

La priere provient du livre "To Bless the Space Between Us" par John O'Donohue. L'illustration est une peinture de Bill Jacklin, detail, Calle II, oil on canvas, 2008.

Saturday, January 14, 2017

Une retraite entre mer et montagnes

En janvier, je raconte souvent à mon entourage américain que si nous étions en France, nous tirerions les Rois à chaque nouvelle réunion avec une galette (« a flat cake with almond filling »). Parfois la galette me manque – pas tant la frangipane que  l’entourage de ceux qui la connaissent et pour qui cette coutume est une évidence.

Mais galette ou pas, janvier est ici aussi le début d’une nouvelle saison. Parce que je préside une petite commission du Presbytery, j’ai été invitée à une retraite destinée aux « leaders » de notre région pour bien commencer l’année. Pas de galette, mais une table abondante dans la grande maison d’une de nos pasteures, qui animait la retraite. Cette maison se trouve en front de mer – dans notre région, ca veut dire en bordure du Puget Sound, où l’océan entre profondément dans l’intérieur des terres, jusqu'à Tacoma, un bras de mer pourvu de nombreuses iles.

Les pics des montagnes Olympiques sont a peine visibles, au dessus de l'horizon

Par temps clair, ce qui était le cas jeudi, nous pouvions voir le Mt Rainier à l’est et la chaine des montagnes de la péninsule Olympique à l’ouest, tous couverts de neige.
Mt Rainier
Nous étions réunis pour mieux nous connaitre et exercer notre créativité. Elisabeth nous a donné à choisir parmi de nombreuses photos d’œuvres d’art. J’ai choisi celle-ci. Je ne savais pas encore qu’il s’agissait d’une « convalescente » peinte par Degas.

Comme beaucoup de pasteurs, je suis une introvertie qui a besoin de solitude pour « recharger les batteries » d’autant plus que je fonctionne en extravertie dans le cadre de mes activités. Le visage de la convalescente n’exprime rien, la fatigue de la maladie récente est encore la. Mais c’est aussi mon visage quand je n’ai plus besoin d’exprimer quoi que ce soit, dans le repos. Des moments de « jachère » importants.

Elizabeth, notre hôtesse, debout derrière nos fauteuils, nous a lu des bénédictions et des prières pleines de sens. 
Quand on lui proposa de s’asseoir, elle sourit. « Sitting is the new smoking ! » expliquant qu’elle a installé son bureau de façon etre debout pour travailler devant son écran. 

C’est vrai que des études récentes et concordantes montrent que la sédentarité cause des problèmes de sante comparables au tabac.

De quoi  refléchir sur nos postures du quotidien…. 

Sunday, January 1, 2017

Première page


Il a neigé dans la nuit : l’année commence dans la blancheur dans notre petit coin du Pacific Northwest. Il nous est donc donné de faire nos premiers pas de 2017 sur une surface vierge avançant littéralement dans cette année toute neuve. Une année que beaucoup d’entre nous appréhendent plus qu’aucune autre.

« L'optimisme est la croyance que les choses vont s’améliorer. L’espoir est la conviction qu’ensemble, nous pouvons améliorer les choses. L’optimisme est une vertu passive. L’espoir est actif. Pas besoin de courage pour être optimiste, mais nous avons grand besoin de courage pour espérer. »  – Rabin Jonathan Sacks [1]

Courage, conviction et espoir : des vertus auxquelles s’agripper face à l’inconnu que les mois prochains vont révéler. A suivre….






[1] cité par Rabin Bruce Kadden, dans l’article du News Tribune Faith leaders usher in 2017 with words of unity and hope” http://www.thenewstribune.com/opinion/article124007204.html